Les effectifs constituent l’indicateur de base de la mesure sociale : parler d’une entreprise, c’est le plus souvent citer son chiffre d’affaires et ses effectifs. « L’effectif » est en quelque sorte un des marqueurs de son identité.
Le comptage des effectifs n’est pas une petite affaire et pose quelques questions techniques que nous abordons plus bas. Mais par delà ces problématiques méthodologiques, le sujet de fond est celui des besoins en compétences pour mener à bien les projets de l’entreprise. On ne peut donc pas dissocier la mesure quantitative de la mesure qualitative, afin de garantir « la bonne personne au bon endroit au bon moment… »
En théorie et dans un monde parfait, la démarche de Gestion Prévisionnelle des Emplois et des Compétences (GPEC), récemment rebaptisée « Strategic Workforce Planning » a précisément pour objectif d’assurer l’adéquation entre les besoins en capital humain, et les ressources.
En réalité, ce n’est pas si facile. Et pas vraiment pratiqué, bien qu’inscrit dans le cadre réglementaire français depuis 2005 : une étude CEREQ[1] de 2019 évaluait à 25% seulement la proportion des entreprises engagées dans une démarche systématique de gestion des compétences. L’actualité nous permet régulièrement d’observer des plans de licenciement massifs dans certains secteurs, et des difficultés de recrutement dans d’autres, ce qui témoigne d’un certain manque d’anticipation. Concrètement plusieurs obstacles se dressent :
[1] Cité dans : Working Paper n°7, avril 2019, Auteur Carmelo Zizzo, France Stratégies , « Les déterminants de la gestion des compétences au sein des entreprises ».
Les effectifs sont donc une donnée de base… et le point de départ de très nombreux indicateurs sociaux : impossible de calculer un taux de turnover, un taux d’absentéisme ou un salaire moyen sans disposer des effectifs !
Comment définir les effectifs ?
Le problème est qu’il n’existe pas une seule définition, mais de très nombreuses variantes en fonction de l’activité de gestion qu’on souhaite mettre en œuvre. Un plan de formation, un budget de masse salariale ou une analyse de productivité n’intègreront pas les mêmes données. Il faut distinguer :
Sur le plan méthodologique, il faut distinguer 3 visions différentes :
Ces trois types d’acteurs n’utiliseront pas les mêmes niveaux d’effectifs. Et pourtant…ils doivent pouvoir se parler et se comprendre. Il est donc indispensable de les réconcilier en établissant des correspondances entre les différentes définitions.
Quelque soit la vision que l’on adopte, il faut ensuite se poser un certain nombre de questions pour élaborer les définitions avec rigueur. Schématiquement :
Une fiche détaillée sur le sujet sera bientôt intégrée dans les « Ressources » de ce site.
Il est donc indispensable de faire des choix, d’identifier les niveaux d’effectifs qui seront utiles aux acteurs et aux différents activités de gestion, et d’élaborer et documenter très précisément les définitions dans un dossier de référence. Cela servira de base au SIRH, et à l’élaboration de tous les indicateurs et tableaux de bord.
Que faire des effectifs ?
Ils sont à la base de très nombreux indicateurs que nous ne reprenons pas ici (liste d’indicateurs téléchargeable sur ce site) .
Au-delà du constat ou de la photographie plus ou moins détaillée des effectifs à un instant t, c’est la dynamique qui est intéressante. Comment les effectifs évoluent-ils ? Quels sont les mouvements, quel est le détail des arrivées et des départs ? Quelle est la démographie prévisible de nos effectifs ? Constate-t-on des départs, des démissions, des difficultés de recrutement ? Faut-il recourir à du personnel extérieur ?
Dans le pilotage des effectifs il faut donc considérer à la fois :
A moyen terme, la question du nombre ne peut être déconnectée de la dimension qualitative de la compétence. Derrière les effectifs, il y a des personnes qui ne sont pas interchangeables, et qui évoluent au cours de leur vie professionnelle.
[1] Code de la Sécurité Sociale Art R 130-1 : https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?idArticle=LEGIARTI000034668388&cidTexte=LEGITEXT000006073189
Le contrôleur de gestion n’est pas un spécialiste de l’ingénierie des compétences. Pourtant, dans le cadre d’une gestion prévisionnelle des effectifs, il ne peut faire l’impasse sur ces questions.
Les organisations, les méthodes de travail et les métiers sont bouleversés par la révolution numérique ( digitalisation, IA, robotisation, blockchain…). Les impacts sur l’emploi , sur les besoins en compétences, et sur la société en général, vont être colossaux. De nombreuses études brandissent des chiffres affolants, parfois contradictoires :
La notion de « métier » est devenue très mouvante, une approche par blocs de compétences est parfois aujourd’hui privilégiée.
Le contrôle de gestion n’est pas là pour apporter des réponses sur ces sujets, mais pour poser des questions, et alerter sur les risques. Par exemple (liste non exhaustive) :
Le sujet présente donc de nombreux défis, mais c’est un point clé de la performance de la fonction Ressources Humaines, celui où la notion de KPI prend tout son sens…
Le premier principe que je retiens est classique, intemporel et partagé, les trois suivants sont plutôt des suggestions ou des propositions (dont je n’ai pas l’exclusivité…mais que j’ai rarement vu appliquer en pratique, pour l’instant) :
La crise liée à la Covid19 donne un relief particulier à toutes ces questions. Au-delà des questions techniques de comptage (chômage partiel, absences…), se pose la question des réorganisations du travail, du management, des nouvelles compétences à acquérir. Autant de sujets à piloter, qui ne rentrent pas aujourd’hui dans les reportings rituels, mais qui sont pourtant essentiels.